Un billet de notre bloggeuse invitée, Kalliopé Anvar McCall.
Le film How to Blow Up a Pipeline nous montre qu’il est grand temps que l’on s’en prenne aux machines qui détruisent notre planète.
Le nouveau film écolo-suspense de Daniel Goldberg, How to Blow Up a Pipeline, a suscité une réaction impressionnante de la part du secteur pétrolier à sa sortie en septembre dernier à Toronto. À travers le Canada, puis, à travers le monde, nombreuses furent les compagnies d’énergies fossiles qui, prises par la peur du sabotage, ont augmenté leur sécurité tout au long de leurs oléoducs. Cette réaction soudaine me rempli, étrangement, d’espoir et de bonheur: si les pollueurs ont agi aussi rapidement à cause d’un simple film hollywoodien, c’est sans doute parce qu’ils craignent le pire. La peur est souvent un bien utile outil de motivation. Peut-être nous écouteront-ils enfin.
Voilà justement le plus grand accomplissement du film, selon moi. Connaissez-vous le principe de la « fenêtre d’Overton » ? C’est ce qui permet à l’impensable de devenir courant, en politique. La diffusion mondiale de How to Blow Up a Pipeline contribue de façon importante à ce phénomène de transition sociale du radical au toléré. De plus en plus, l’action directe, la désobéissance civile, et le sabotage sont acceptés, ou même jugés nécessaire, comme stratégies activistes par le public pour qui la crise climatique commence à devenir une source d’anxiété majeure. D’autant plus, les manifestations environnementales pacifique et modérée semblent, en comparaison, complètement inoffensives et sympathiques. Voilà donc pourquoi ce film me fait du bien: il laisse place à la conversation entre les écolos de tout genre et les compagnies pétrolières.
Mais soyons clair: How to Blow Up a Pipeline n’a pas été conçu pour faire bien paraître les écolos plus modérés. Non plus a-t-il pour but de remporter la palme d’or à Cannes ou de faire des milliards à la première. C’est un film sobre qui porte un message important : il est grand temps que l’on s’en prenne aux machines qui détruisent notre planète.
C’est Andreas Malm, dans son livre paru en 2021, un manifeste qui porte le même nom que le film, qui défend la nécessité du sabotage pour lutter contre les industries pétrolières et gazières. Ce qui m’a particulièrement plu du film, c’est que Goldberg ait intégré la philosophie de Malm sans se poser de questions, sans débattre la légitimité de cette tactique. En effet, les personnages prennent pour acquis la nécessité et l’urgence du sabotage ; leur détermination est inébranlable et profondément touchante. C’est une lettre d’amour à la désobéissance civile.
Vous rappelez-vous du film Déni Cosmique (Don’t Look Up) d’il y a deux ans ? C’est un film du même genre, une sorte de dramédie écolo-suspense. Sauf que, ce film-là, visait un publique très différent : des gens moins éduqués sur la crise climatique, des gens qui, peut-être, s’en foutent un peu, des gens qui veulent rire sans prendre la morale de l’histoire trop sérieusement. How to Blow Up a Pipeline n’est pas du tout comme ça. C’est un film avec une morale très, très claire. Le scénario est simple et efficace, la cinématographie aussi. Les personnages, une bande de jeunes blasés mais prêts-à-tout, me rappellent mes amis et connaissances du monde de l’activisme environnemental.
Moi, ça m’a fait un bien fou.
Source images : IMDB
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